Martin est un adolescent qui se prend pour un vampire. A moins que ça ne soit le contraire. Il n'a pas 20 ans et plus de 80 tout à la fois. Parfois, il tue...
Tourné juste avant Dawn of the Dead, Martin fait partie de la série des films un peu "expérimentaux "de Romero : The Crazies, Season of the Witch, et Martin donc, autant de métrages d'environ une heure et demi tournées en 16 mm, rapidement, à équipe réduite et sans trop de moyen. Si the Crazies a gagné avec le temps le statut d'une sorte de prequel à la trilogie des Morts Vivants -il est cependant dommage de ne le reduire qu'a ça-, Martin se place quand à lui dans la lignée de Season of the Witch. Un film lent, quasi documentaire, où comme pour la sorcellerie dans Season, le vampirisme est abordé sous l'angle d'une ambiguité et d'une reflexion. Comme dans Season of the Witch, Romero se lance dans un registre plus urbain qu'a l'accoutumé, filmant sa ville fétiche, Pittsburgh, comme certains filmeront New York dans les années 80. Néanmoins, là où Season of the Witch avait un aspect déconcertant, car très brut voir amateur dans son aspect, Martin se révèle plus abordable par sa réalisation élégante.
Qui est fou ? Qui ne l'est pas ? Est-ce Martin, vrai ou faux vampire, timide adolescent qui saigne des jeunes femmes ? Est-ce son oncle bigot et obsédé d'exorcisme ? Le plus surprenant dans Martin reste son traitement par l'absurde. Malgré la mélancolie de son sujet, où l'on suit tant les meurtres de Martin que sa maldresse et son mutisme touchant, le film n'est pas dépourvu d'une certain surréalisme, en témoigne les réactions de l'oncle, l'exorcime ou cette très belle scène nocturne où Martin effraye son oncle, déguisé en vampire de cinéma.
D'un réalisation et d'un montage particuliier, Martin alterne, presque ironiquement à nouveau, des séquences urbaines froides avec des scènes oniriques en noir et blanc à la tonalité presque gothique et indéniablement référentielle. Loin de plomber le film, ces scènes lui donnent un côté fascinant, le transformant en patchwork qu'on a du mal à cerner.
Reflexion intéressante pour un film dont le caractère fantastique dépendra de la perception de chacun, Martin est une oeuvre forte et troublante, assez atypique dans la filmo de Romero, mais peut être son interrogation la plus subtil sur l'humain. Avec Season of the Witch...
Insolite : Dans le rôle d'un mécanicien, la présence de Tom Savini sans sa moustache.
Dans le rôle d'un prêtre, un cameo de George Romero sans sa barbe (décidement).
Le DVD
Non content d'avoir un packaging un peu douteux -chaque fois que je l'ouvre, j'ai l'impression d'avoir acheté un collector de Terreur.Com...-, le DVD a été recadré, bidouillage ayant toutefois reçu la bénédiction de Romero. Pas spécialement gênant, le recadrage rend toutefois une scène gore pratiquement hors champs, ce qui a de quoi énervé, même si Martin a d'autre qualité que son explicisme.
Niveau bonus, pas encore tout vu. Une interview sympa de Romero, qui s'égarant un peu sur ses souvenirs d'enfance, se fend d'une anecdote rigolote concernant l'enterrement de sa grand mère (!!). "Romero vu par..." Alain Schlockoff et Jean Baptiste Thauret est un module intéressant, mais qui n'apprendra rien pour qui connait le réalisateur -ou a vu ses films-.